Le Ferry nous a relancé sur le continent. Retour pour 500 kilomètres de bitumes à avaler. Direction affichée : up north. Tout droit dans le sens de là-haut.
Cape Jervis derrière nous, la route de nouveau dans les coteaux viticoles. Pas de grandes artères, de grands réseaux autoroutiers ici. Le nom autoroute existe bel et bien, mais ce sont des nationales, parfois des départementales.
Les clignotants restent décidemment à droite du volant. Veulent rien entendre. Sont bornés… Moi aussi. Pas dans mes habitudes, ça. Résultat, à tous les carrefours, à chaque dépassement, pour signaler mon changement de direction, j'actionne les essuies glaces. Je maugrée, sourit benoitement. Ai l’air d’un c.n, surtout… ;)
Une journée derrière le volant. Comme un spectacle où l'action s'affiche au delà de l'habitacle, où le bitume se charge de la balade. On voudrait être estomaqué par le dépaysement total. Des pics abrupts, des rochers grandiloquents, des plaines à perte de vue, voilà ce qu'on attend. La France est à 18000 kms, au moins, et ça serait étonnant de se retrouver avec une paysage des deux sèvres ou un moyenne montagne jurassienne.
Et pourtant… Les petites villes se succèdent, rares. Et les vallées, la végétation, les tonalités affichent des airs de déjà vu. Ca se mélange dans nos explications, Antoine s'exclame, il se moque de moi… Il n'empêche… S'il connaissait le Puy de Dôme, sa chaine des puys, il tiendrait le même discours. Car oui, je tiens mordicus que tel virage, tel alignements de silhouettes de petites montagnes, aperçues au loin, me rappelle mon Auvergne. C'est vert, parfois, rocailleux aussi. Les blés viennent tout juste d'être moissonnés. Suis à deux doigts de penser à mon Saint-Nectaire, à guetter les Salers dans un champs en contrebas.
Mais non, la route s'affine.
Les monts passent derrière nous. La route devient plus droite. Les petites villes se raréfient encore.
L'Auvergne, non. Là, plus maintenant, terminé. Plus nous allons au nord, plus les paysages deviennent plats, silencieux, d'une étendue farouche, le relief moins présent. Les contrées américaines, celles du wild wild East deviennent une comparaison évidente.
L'Amérique semblent s'être transportées ici. Celle de ces Etats sans fin, aux kilomètres illimités, où l'horizon se perd sans ville alentours. Ici donc, Australie du Sud, tout semble si similaire. Des kilomètres de bitume à rouler sans voiture à croiser, sans ville à traverser. Des bourgades pourtant. A 20, 30 kms les unes des autres. Entre chacune, juste ces champs, ces terres sans cultures, où la main de l'Homme se fait rare.
Monter au Nord d'Adelaide, grimper dans les latitudes, lorsque l'on s'éloigne de la côte, c'est cheminer lentement vers un rythme plus lent.
Mintaro, petite ville atypique où l’on fait un stop. Quelques bed and breakfast, façades de bois qui donnent sur la rue, terrasses sous mezzanine, ambiance "Sur la route de Madison". On s'attend presque à deviner Meryl Streep derrière les stores. Calme, paisible, une ville similaire à un magasin d'Antiquités. Même allures, même rythme suranné.
Les villes que l’on traverse désormais semble d’un autre temps. Disséminé le long de la B 87 elles ont des allures de far west. Une route principale large. Des façades qui se succèdent. Un drugstore, un garage, un marchand de tracteur, des maisons alignées. Mais si peu de voitures garées devant. Et pas âme qui vive. Pas de passant, pas de cris d'enfants, de bruits de tondeuse, de moteur, de vie. Les villes font fantomatiques. Rester là une demi heure, c'est compter une demi poignée de voitures à l’heure. Des architectures de saloon, partout. Il manque les chevaux qui patientent, leur maitre en stetson qu'on imagine à l'intérieur. Où est l'harmonica de "Il était une fois dans l'Ouest"?
Quorn, ville un peu plus active. Pas une rue, des rues. Un centre ville incroyablement calme, encore, mais où la présence humaine est moins anecdotique. Déjeuner. Il nous faut déjeuner. On avise un établissement, "Emilie's Restaurant". Immense de façade, vitrine improbable, avec un mannequin revêtu de tenues début XIXème. Dedans le charme d'une boutique de 200m carrés restée dans son jus depuis plus d'un siècle.
D'un côté les étals d'une épicerie de gros, rayonnages de farine, de boissons, de conserves de tomates. De l'autre, des banques en vieux bois, des bijoux dedans, des vêtements un brin surannés à la vente. Et entre les deux, des tables, rondes, d'un restaurant old school, avec des gâteaux faits maison ici, un vieux piano et des canapés élimés là.
De l'autre côté, la train station, celle du fameux Pichi Richi. Le train qui partait jadis d'Adelaide en direction d'Alice Springs. Les vieilles locomotives d'abord à vapeur, puis les motrices diesels. Elles ont cessé l'activité, la gare est devenue un musée.
Mais le charme perdure, la nostalgie siffle encore… L'histoire de la conquête intérieure de l'Australie s'est inscrite sur ces rails.
Nous prenons la route. Il est l'heure de passer la nuit. Plus au nord encore. L’hôtel "North Starr Inn" à Melrose (le plus ancien hôtel/restaurant de la région !) sera notre pause, ville frontière, ville étape, à l'orée des Flinders Ranges...
A demain !
François-Xavier
Consultez la source sur Monnuagetvleblog.20minutes-blogs.fr: Sur la route en Australie du Sud