« Ce sont les expériences et non les choses qui nous rendent heureux. Un chercheur britannique a découvert que ceux qui s’offraient souvent des plaisirs à bas prix – un pique-nique, un café, un DVD – étaient les plus satisfaits de leur vie. » (Illustration © Luc Melanson)
Depuis de nombreuses années, les psychologues ont surtout cherché à comprendre et à soigner les douleurs de l’esprit. En fait, pendant des siècles, la psychologie était un rameau de la philosophie, jusqu’à ce qu’elle se transforme en théorie et science du comportement. Or, autour du millénaire est apparue une nouvelle dimension de cette discipline, la psychologie positive. Avec cette approche, les psychologues veulent nous orienter vers une vie meilleure en s’appuyant sur des données expérimentales.
Sonja Lyubomirsky, d’origine russe, directrice d’un laboratoire à l’Université de Californie à Riverside, a entrepris dans ses travaux de déboulonner les mythes de la vie heureuse, persuadée que « le bonheur de la quête est plus important que l’obtention du bonheur ». Dans Qu’est-ce qui nous rend vraiment heureux ?, la thérapeute américaine, s’inspirant des travaux scientifiques de ses collègues, s’évertue à mettre à profit les résultats d’études qui contredisent les clichés habituels.
Ainsi, malgré leur dimension idyllique, les joies du mariage ne dureraient que deux années en moyenne. Par la suite, un couple doit sans cesse se réinventer s’il veut conserver le plaisir de vivre à deux, or, 40 % des gens mariés n’y arrivent pas. Et tant pis pour le mythe de la jeunesse, c’est après 65 ans qu’on est le plus heureux. Pire : les personnes les plus scolarisées seraient souvent les plus malheureuses, ayant de trop grandes attentes professionnelles. Et sait-on que les locataires d’appartement profitent plus de la vie que les propriétaires, qui ont la responsabilité d’un bâtiment ? Ces notions seraient toutes statistiquement vérifiables.
La psychologie positive, on le devine, est à cheval entre sa discipline d’origine, la philosophie (car Lyubomirsky se préoccupe du sens de la vie), et une certaine propension à faire le marketing du plus petit dénominateur commun. Que ce soit à propos de la sexualité, de la vie des enfants, du travail, de ce qu’apporte l’argent ou la vieillesse, l’auteure finit toujours par proposer une sortie de crise en suggérant de ne jamais se comparer aux autres et en rappelant « l’habituation hédonique », c’est-à-dire la propension des humains à s’habituer à tout, surtout au bonheur. La richesse extrême, la réussite, la passion amoureuse ou la gloire médiatique ne rendent heureux que momentanément, rappelle-t-elle, « dans la vie, rien n’a jamais l’importance qu’on lui prête ».
En ce sens, opter pour la simplicité volontaire est plus un gage de bonheur que travailler jour et nuit pour accumuler des richesses et posséder des objets symboliques.
La première chose à faire serait donc « d’examiner les attentes culturelles que nous impose la société ». En France, le principe de précaution prédomine, aux États-Unis, la prise de risque est valorisée. Le bonheur québécois (moins de travail, plus de nature) n’est pas celui des Canadiens (plus de productivité, plus de richesse). La leçon que l’on peut en tirer est que si les partis politiques veulent changer la vie, la psychologie positive leur trace la voie.
Sur le plan pratique, pour construire son « estime de soi », la sociopsychologue propose de tenir un journal, de rédiger une autobiographie, de faire des listes d’espoirs réalisés ou déçus, en somme, de puiser dans l’écriture la force de maîtriser son destin. Je ne vais évidemment pas la contredire à ce propos, mais j’ajouterais que la lecture d’essais ou de romans est aussi une des clés du bonheur de vivre.
Qu’est-ce qui nous rend vraiment heureux ?,
par Sonja Lyubomirsky, traduit de l’américain, Les Arènes, 318 p., 32,95 $.
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