Jean-Marc Robitaille, maire de Terrebonne. Et menteur. Détaillons.
7 novembre 2013. À peine réélu pour un cinquième mandat (avec 62 % des voix), M. Robitaille cesse enfin de se cacher des journalistes pour confirmer un séjour de rien du tout sur le Touch, le chalet flottant de Tony Accurso. Il ne s’agissait «pas de vacances planifiées et payées» par l’entrepreneur, insiste-t-il. M. Robitaille prenait ses vacances dans le même paradis tropical que les entrepreneurs Tony Accurso et Normand Trudel (deux amis aujourd’hui accusés de fraude à Mascouche). C’est un pur hasard s’il les a croisés, dit-il.
8 septembre 2014. La Ville de Terrebonne publie un communiqué cryptique à la suite du témoignage à la commission Charbonneau de Tony Accurso, qui a déclaré sous serment avoir payé toutes les dépenses de M. Robitaille, lors de deux voyages sur le Touch. La Ville déplore les allégations qui portent «faussement et injustement préjudice» au maire, en ce qui a trait aux démarches de Tony Accurso pour obtenir un dézonage des terrains de l’ancienne pépinière de Montréal, à Terrebonne. «Une analyse rigoureuse basée sur des faits réels, leur chronologie et sur des fondements juridiques viendra guider la Ville dans ses commentaires futurs relativement à ces mêmes allégations. Pour cette raison, et ce, tant que l’analyse juridique ne sera pas complétée, ni la Ville ni le maire n’émettront d’autres commentaires à ce sujet», affirme le communiqué.
10 septembre 2014. Le maire Robitaille coupe court aux savantes analyses juridiques et il présente ses plus plates excuses dans une déclaration écrite. «À la suite du témoignage de M. Accurso à la Commission Charbonneau, je confirme que j’ai effectivement séjourné gratuitement sur son bateau à deux reprises, et ce, à l’invitation de Normand Trudel», fait savoir M. Robitaille. «Cela dit, je reconnais aujourd’hui que lorsque cette question m’a été adressée publiquement en novembre 2013, je n’ai pas su faire face à la situation tel que l’exige ma fonction de maire. Je n’ai pas dit la vérité, car j’étais gêné et déstabilisé. Bref, je me sentais dépassé par les événements. J’ai alors manqué de jugement et croyez-moi, je le regrette amèrement et sincèrement», écrit-il.
Et c’est ainsi que le maire Robitaille s’est fabriqué un beau costume de menteur qui lui va si bien. Le maire est en poste jusqu’en novembre 2017, et il bénéficie d’une confortable majorité au conseil. Il ne lui arrivera rien.
Le mensonge n’est pas un motif de destitution, autrement il y aurait beaucoup de politiciens au chômage au Québec. Au mieux, les Terrebonniens le prendront en pitié ; au pire, ils le tourneront au ridicule.
M. Robitaille a sapé les fondements de sa propre autorité morale. Sa crédibilité ? Elle a basculé par-dessus bord, quelque part en haute mer sur le Touch. Est-il sincère lorsqu’il affirme maintenant que la Ville de Terrebonne n’a consenti aucun avantage à Tony Accurso ?
Dans le dossier de la pépinière, il peut au moins s’accrocher à une bouée de sauvetage : les terrains n’ont jamais fait l’objet d’un changement de zonage ; ils restent protégés à des fins de conservation. Ouf ! Mais que diable faisait-il en voyage avec Tony Accurso ? Et pourquoi a-t-il voulu cacher au public sa relation avec lui ?
M. Robitaille peut dire ce qu’il veut, accuser la commission Charbonneau d’avoir pris des raccourcis, blâmer la Ville de Montréal pour avoir vendu les terrains dans son dos, sans appel d’offres. Il reste que le mal est fait. Appelons ça le mal du menteur.
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À propos de Brian Myles
Brian Myles est journaliste au quotidien Le Devoir, où il traite des affaires policières, municipales et judiciaires. Il est présentement affecté à la couverture de la commission Charbonneau. Blogueur à L’actualité depuis 2012, il est également chargé de cours à l’École des médias de l’Université du Québec à Montréal (UQAM). On peut le suivre sur Twitter : @brianmyles.
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