Philippe Couillard a donné le ton et peut-être le mode d’emploi de son gouvernement dans son discours d’ouverture, mercredi.
Le gouvernement veut asseoir ses décisions sur un certain nombre de principes qui guideront ses actions. Le premier ministre aime la clarté et la logique. Il fait un constat et énonce un certain nombre de propositions qui seront à la base des décisions de son gouvernement.
L’énoncé de mission de son gouvernement pourrait se résumer ainsi : pour maintenir les services publics, il faut impérativement assainir les finances publiques et favoriser la croissance de l’économie.
Sur les finances publiques, le premier ministre est clair, net et limpide. Le Québec compte 23 % de la population du Canada, produit 20 % de l’activité économique et assume 27 % des dépenses de l’ensemble des provinces. La situation est intenable, car nous dépensons trop et nous avons étendu à son maximum l’élastique de l’endettement et de la fiscalité.
Plus que les mesures d’austérité qui seront nécessaires, c’est le déficit structurel qui fait peser la plus grande menace sur les services publics. Ne pas s’attaquer au déficit et à la dette constitue une menace à notre liberté de choix, a-t-il dit. Si rien n’est fait, le déficit atteindra 5 milliards de dollars pour l’exercice en cours et 7 milliards de dollars en 2015-2016. Sur ce thème, on croyait entendre Lucien Bouchard. Je vois la même fermeté et le même engagement.
Pour changer la culture de l’État, le nouveau premier ministre mettra sur pied deux commissions. La première, sur la fiscalité, touchera la question des impôts, des taxes et des cotisations. Elle abordera aussi la question de l’aide aux entreprises, une aide qui ne donne pas les résultats escomptés, a dit Philippe Couillard.
Une autre commission, permanente celle-là, s’assurera que chaque programme soit pertinent et chaque dollar, bien dépensé. Philippe Couillard veut que chacun des nouveaux programmes soit accompagné de l’élimination d’un programme existant.
Ce sont là de bonnes décisions. Des mesures substantielles et innovatrices doivent être adoptées pour changer des raisonnements et des habitudes adoptés il y a des décennies et qui ont mené à la situation actuelle. Le Québec est au bord du psychodrame à chaque dépôt de budget et il faut encadrer la discussion et prendre les bonnes décisions, même les plus difficiles.
Pour le court terme, le gouvernement veut profiter du départ à la retraite de nombreux fonctionnaires pour éliminer 10 % des postes administratifs dans le domaine de la santé. En éducation, ce sont les directions régionales du ministère qui seront les plus touchées.
Le prochain budget, présenté au début du mois de juin, promet d’être très intéressant. La rumeur court déjà que l’objectif d’un déficit de 1,75 milliard de dollars pour l’exercice courant est inatteignable. Monsieur Couillard a confirmé son engagement d’un retour à l’équilibre budgétaire dès 2015-2016.
Le premier ministre a aussi réitéré l’objectif de 250 000 emplois supplémentaires dans les cinq prochaines années. Même si cet aspect constituait le thème dominant de la campagne libérale, Philippe Couillard a été moins décisif et plus flou sur la question du développement économique, malgré l’annonce de la relance du Plan Nord et la promesse d’alléger le fardeau réglementaire des PME. Il a été aussi plus paradoxal.
Ainsi, le gouvernement fait valoir que l’État assume une trop grande partie du risque dans le projet de cimenterie de Port-Daniel, en Gaspésie, et de l’exploitation pétrolière sur l’île d’Anticosti. C’est légitime, et cela peut constituer une bonne position de négociation pour revoir certains éléments de ces ententes.
Dans le cas d’Anticosti, le feu vert définitif pourrait suivre l’étude stratégique environnementale promise par le premier ministre dans son discours. Aussi bien dire que le projet est sur la glace et pour longtemps. Je ne m’en réjouis pas.
Paradoxalement, le premier ministre donne immédiatement son feu vert aux minicentrales électriques dont nous n’avons pas besoin pour notre approvisionnement énergétique. Le risque ici est pour les citoyens, car ce sont ces décisions qui conduisent aux importantes hausses de tarifs d’électricité.
J’aime la logique de Philippe Couillard, mais elle prend de drôles de détours quand il s’agit des minicentrales et des éoliennes.
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À propos de Pierre Duhamel
Journaliste depuis plus de 30 ans, Pierre Duhamel observe de près et commente l’actualité économique depuis 1986. Il a été rédacteur en chef et/ou éditeur de plusieurs publications, dont des magazines (Commerce, Affaires Plus, Montréal Centre-Ville) et des journaux spécialisés (Finance & Investissement, Investment Executive). Conférencier recherché, Pierre Duhamel a aussi commenté l’actualité économique sur les ondes du canal Argent, de LCN et de TVA. On peut le trouver sur Facebook et Twitter : @duhamelp.
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