À l’instar des autres pays membres de l’OTAN, l’actuelle mission militaire des États-Unis en Afghanistan arrivera à son terme d’ici la fin de cette année.
Alors que 53 % des Américains sont insatisfaits de la façon dont le président Obama gère le dossier afghan, celui-ci devrait profiter du discours sur l’état de l’Union de ce soir pour clarifier — auprès de sa population tout autant que des alliés des États-Unis — la stratégie que son administration entend mettre en œuvre en Afghanistan au-delà de 2014.
Le maintien ou non d’une présence militaire en sera l’élément majeur tant il déterminera l’avenir de l’Afghanistan.
Le débat au sein de l’administration sur le nombre de troupes
Le commandant en chef de la FIAS, le général Joe Dumford, et l’ambassadeur américain à Kaboul, Jim Cunningham, étaient à la Maison-Blanche le 27 janvier pour participer à des rencontres sur l’avenir de la mission des États-Unis en Afghanistan.
Le niveau de la présence militaire américaine au-delà du 31 décembre 2014 est au cœur des délibérations de l’administration Obama.
Depuis le sommet atteint en juin 2012, le nombre de troupes américaines déployées en Afghanistan a considérablement diminué. De 88 000 au milieu de 2012, elles ne seront plus que 34 000 à compter du 1er février, réparties à travers 89 bases contre 800 environ il y a à peine quelques mois.
Bien que la décision n’ait pas été rendue publique au moment d’écrire ces lignes, il semblerait que l’administration Obama soit prête à laisser entre 3 et 8 000 soldats en Afghanistan au-delà de 2014. À ceux-ci s’ajouterait un contingent de 5 000 soldats provenant des différents pays membres de l’OTAN.
Si elle n’est pas totalement négligeable, une telle présence militaire demeure cependant en deçà des niveaux jugés acceptables pour assurer la stabilité de l’Afghanistan. L’ancien responsable du Central Command, le général Jim Mattis, estime par exemple que 13 600 soldats serait le seuil minimal pour assurer l’efficacité d’une mission qui devrait se concentrer sur l’encadrement, le conseil et la formation des forces de sécurité afghanes, ainsi que sur la conduite d’opérations ponctuelles de contre-insurrection et de contre-terrorisme.
Les facteurs d’incertitude du prolongement de la mission
L’état de l’opinion publique américaine peut en partie expliquer les hésitations actuelles au sein l’administration Obama. En effet, un sondage Washington Post / ABC News souligne que 66 % des Américains sont aujourd’hui sceptiques vis-à-vis de la guerre en Afghanistan.
Malgré ce scepticisme constant depuis 2010, il n’en demeure pas mois que 55 % des Américains sont favorables au maintient d’une présence militaire en Afghanistan au-delà de 2014. Ils ne sont que 41 % à préférer un retrait complet.
S’il ne fait guère de doute que l’administration Obama prend en considération l’état de l’opinion publique, la présence militaire des États-Unis en Afghanistan au-delà de 2014 est avant tout conditionnelle à la signature d’un accord bilatéral de sécurité (le BSA) entre les deux pays.
La Maison-Blanche est très claire à ce sujet comme le rappelait son porte-parole pas plus tard que le 24 janvier. L’essentiel des négociations dans ce document, qui fixe les règles régissant la présence des soldats américains et les protections juridiques dont ils bénéficient, sont achevées depuis l’automne 2013. En novembre, l’assemblée des sages, la loya jirga, a signifié son appui à une présence militaire occidentale prolongée et a invité le président Karzaï à signer cet accord.
Celui-ci multiplie pourtant les demandes inacceptables aux yeux des Américains. Il considère même dorénavant que la décision de signer ou non une telle entente devrait revenir à son successeur, qui sera désigné à l’issue des élections du 5 avril prochain.
Ces tergiversations du président afghan ont des conséquences sérieuses. Elles alimentent la frustration des décideurs américains.
Si la Maison-Blanche a quelque peu atténué la pression qu’elle cherchait à imposer à Hamid Karzaï, les membres du Congrès ont eux décidé de couper de 50 % le montant de l’aide accordée à l’Afghanistan. Elle devrait ainsi s’élever à 1,12 milliard de dollars pour l’année fiscale 2014.
Le département de la Défense a quant à lui besoin d’une réponse le plus rapidement possible afin de planifier la présence (ou non) de soldats américains après 2014.
Enfin, les partenaires de l’OTAN attendent la signature d’un tel accord afin de pouvoir en signer un similaire pour leurs forces.
Les résultats de l’intervention militaire des États-Unis en Afghanistan sont difficiles à évaluer si l’on raisonne en termes classiques de victoire ou de défaite dans les conflits armés. Il n’en demeure pas moins que le maintien d’une force conséquente au-delà de 2014 est une condition sine qua non à l’enracinement des progrès réalisés depuis 2001 à un coût humain et financier élevé.
Julien Tourreille
Directeur adjoint de l’Observatoire sur les États-Unis
Chaire @RDandurand @UQAM
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