Depuis 2009, des grands projets industriels privés (plus de 1 milliard chacun) qui totalisent 42 milliards de dollars ont été annoncés au Québec. Malheureusement, moins de la moitié de ces investissements sont confirmés ou en cours de réalisation, selon E&B Data, une boîte spécialisée dans l’information économique et industrielle.
Jean Matuszewski, le président de cette société québécoise active dans plusieurs pays, a fait un décompte saisissant. Ainsi, 13 % des projets pourtant annoncés ont été abandonnés et 40 % sont considérés comme fragiles, c’est-à-dire que leur envergure a été réduite, que l’échéancier a été reporté ou que le projet est carrément suspendu.
Parmi les projets dont l’ampleur pourrait être réduite, le président de E&B Data donne en exemple le projet de 13 milliards de dollars de l’entreprise chinoise Wisco et de la torontoise Adriana au nord de Schefferville. Selon lui, la mine serait en terrain solide, mais le projet d’usine de traitement de minerai de fer concentré lui apparaît très fragile.
«Il y avait un nombre élevé de grands projets dans le collimateurs, mais on observe de plus en plus de fragilité dans les projets depuis 18 mois», dit Jean Matuszewski.
Cette difficulté à concrétiser les grands projets privés met le Québec à la traîne de la majorité des provinces en ce qui concerne l’investissement privé. En 2013, l’Alberta, Terre-Neuve, la Saskatchewan, la Colombie-Britannique, le Manitoba et l’Ontario ont mieux fait que le Québec pour l’investissement privé par capita.
La fragilité est plus grande au Québec parce que la majorité des grands projets proviennent des secteurs minier et métallurgique, très affectés par la conjoncture mondiale. Dans l’aluminium, par exemple, il y a une surcapacité mondiale et de nouveaux concurrents qui ont accès à des coûts énergétiques beaucoup plus bas qu’au Québec.
Les investissements se maintiennent beaucoup mieux du côté des hydrocarbures, et des projets importants sont en cours dans six provinces canadiennes. La raison est simple : ces années-ci, les profits des sociétés énergétiques sont trois fois plus élevés que ceux des sociétés minières et métallurgiques.
Si des projets sont enterrés ou suspendus, on peut aussi parler de projets ressuscités. Jean Matuszewski donne l’exemple de l’unité de cokéfaction de la raffinerie de Suncor, à Montréal-Est, un projet de 1,5 milliard abandonné en 2009 et dont il est à nouveau question depuis la demande d’inversion de la canalisation numéro 9 d’Enbridge. Ce projet devrait également susciter des investissements de plus de 200 millions pour les installations de Valero, à Montréal-Est, et à sa raffinerie de Saint-Romuald.
Certains se demandent pourquoi ces grands projets miniers, métallurgiques ou énergétiques sont si importants. La réponse est simple. Les neuf alumineries du Québec comptent 4 000 fournisseurs au Québec qui embauchent eux-mêmes des milliers de personnes.
Il s’agit quelquefois de fournisseurs de proximité, mais on retrouve aussi des sous-contractants spécialisés qui sont eux-mêmes devenus des exportateurs. E&B Data a compté 800 fournisseurs de l’industrie minière sur l’île de Montréal, ce qui fait dire à Jean Matuszewski que Montréal est une ville minière !
En comparaison, un centre de serveurs informatiques — un secteur bien choyé par le gouvernement — n’emploie pas beaucoup de personnes et fait peu d’achats locaux, sauf l’électricité.
On peut lever avec dédain le nez sur les mines et l’énergie, mais ces secteurs ont un effet moteur très fort qu’on ne retrouve pas facilement dans d’autres secteurs.
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