L’opposition syrienne est semblable à l’Hydre de Lerne de par la multitude d’acteurs politiques et militaires qu’elle subsume dans un trait commun (dont le tracé lui-même peut paraître parfois peu évident) : la volonté de faire chuter le régime de Bachar al-Assad.
Ainsi, les soutiens à l’opposition syrienne paraissent perdus dans cette myriade d’acteurs. Le ballet diplomatique s’éternisant, l’on peine à voir le début d’une énonciation claire des objectifs stratégiques pour la résolution du conflit syrien. Néanmoins, un consensus à court terme de la communauté internationale semble se cristalliser autour de l’importance de la tenue de la conférence de paix, dite « Genève 2 », en novembre prochain.
Cette conférence a pour objectif d’amener les protagonistes du conflit à négocier. Toutefois, il n’est guère certain qu’elle puisse se tenir et encore moins aboutir à une feuille de route.
En effet, les divisions sont nombreuses, y compris au sein de la Coalition nationale des forces de l’opposition et de la révolution syrienne. Cette dernière, créée en novembre 2012, a pour ambition d’incarner l’instance politique légitime, représentant les diverses composantes ethniques, idéologiques et religieuses. Le Conseil national syrien (CNS) en est la principale composante.
Celui-ci a cependant annoncé à la mi-octobre qu’il ne participerait pas à la conférence Genève 2. A contrario, la Coalition nationale a prévu de se rendre à Genève 2, alors même que le CNS menace de la quitter si celle-ci participe à la conférence de paix (voir : La création de la « Coalition nationale des forces de l’opposition et de la révolution syrienne» : une tentative de structuration de l’opposition syrienne).
Par ailleurs, il a été observé au cours des derniers mois que le Conseil militaire suprême syrien (CMS) n’avait pas de réel contrôle sur les commandants locaux de l’insurrection et les différents groupes islamistes qui lui sont en théorie affiliés. Le CMS, organe militaire rattaché à la Coalition nationale, a été constitué en décembre 2012 pour coordonner les différentes opérations de l’insurrection syrienne. Dans les faits, il n’est au mieux qu’un organe de distribution, entre les différentes factions, du financement et des aides provenant entre autres de l’Occident, du Qatar et de l’Arabie Saoudite. De plus, son influence a été considérablement affaiblie récemment.
Le 24 septembre 2013, 11 groupes islamistes, parmi les plus importants de l’insurrection, ont annoncé dans une déclaration commune la création d’une « Alliance islamique ». Celle-ci énonce que les groupes signataires ne reconnaissent pas la Coalition nationale et que, de plus, celle-ci ne les représente pas en tant qu’instance politique. Paradoxalement, parmi les signataires, se trouvent des groupes membres du CMS, qui, lui, reste attaché à la Coalition nationale. Une confusion s’installe dès lors dans les relations qu’entretiendront à l’avenir ses groupes avec le CMS, sans compter que dans l’ « Alliance islamique » se trouve Jabhat al-Nosra, groupe affilié à Al-Qaïda. Enfin, 19 groupes rebelles ont rejeté formellement la tenue de Genève 2. (Voir : Portrait de l’insurrection syrienne : perspectives et tendances).
Ainsi, que l’on privilégie à l’avenir la solution d’une négociation avec le régime d’Assad, la dialectique tactique de la carotte et du bâton, ou encore l’option militaire, les éléments ne pouvant qu’enliser le conflit sont la déconnexion des dimensions politique et militaire au sein de l’insurrection syrienne, ainsi que le refus des composantes de l’opposition de prioriser un dialogue interne avec les nécessaires et parfois douloureux compromis l’accompagnant.
Chercheur en résidence, Observatoire sur le Moyen-Orient et l’Afrique du Nord
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