Le gouvernement vient de dévoiler un vaste plan de relance de l’emploi et met toute la gomme pour redynamiser l’économie québécoise.
Cette seule nouvelle pourrait mériter des applaudissements. Non seulement on apprend que l’économie est importante pour ce gouvernement, mais que l’emploi est même devenu sa priorité absolue, c’est écrit noir sur blanc. Qui plus est, ce sont les investissements privés qui seront à la source des investissements créateurs d’emplois.
Je suis quand même étonné de voir naître avec tambours et trompettes cette «stratégie de mobilisation pour l’emploi», alors que les ministres du gouvernement clamaient jusqu’à tout récemment que l’économie du Québec allait bien et que la politique actuelle du gouvernement faisait des merveilles. Le gouvernement était à ce point installé dans le déni qu’il a même balayé du revers de la main les récentes données faisant état d’une très faible création d’emplois au Québec depuis un an, à contre-courant de ce qui se passe dans le reste du pays.
Il n’y aurait pas de problème, mais nous voici avec l’artillerie lourde pour le régler! La réalité a manifestement rattrapé le PQ. Depuis quelques semaines, tout investissement semble mériter une aide de l’État et une annonce par la Première ministre elle-même, qui souligne à gros trait les emplois créés et «consolidés». Le gouvernement est en mode pré-électoral et l’annonce d’une nouvelle stratégie veut projeter l’image d’une équipe qui agit promptement et fortement dans le domaine économique.
Voici mon analyse des cinq idées fortes derrière cette stratégie.
1. Les chiffres frappent: le gouvernement entend dépenser 2 milliards de dollars d’ici 2017, ce qui rendra possible des investissements de 7,6 milliards pendant la même période et assurera la création de 43 050 emplois. Vous voulez d’autres chiffres? Les milliards du gouvernement permettront des investissements de 13 milliards sur 10 ans et le gouvernement vise la création de 115 000 nouveaux emplois au cours des trois prochaines années. Et d’autres encore? Des 7,6 milliards d’investissements suscités par ces mesures, 2,8 milliards découlent «des quatre mesures phares» et 4,8 milliards des «quatre initiatives stratégiques». Limpide.
2. Ces mesures sont bien mieux détaillées que je ne le laisse entendre, mais je veux souligner ici la propension qu’on a au Québec de concocter des politiques, de patenter de nouveaux programmes tous plus extraordinaires les uns que les autres et de créer de nouveaux organismes. Nous voici maintenant avec un Centre d’innovation manufacturière, un Institut du transport électrique, un Réseau Recherche Innovation Québec et un comité d’experts sera créé pour sélectionner les PME les plus prometteuses qui auront droit à un accompagnement particulier. Si le développement économique dépend du nombre d’organismes, nous sommes les plus riches du monde.
3. Ce plan est exhaustif, rien et presque personne n’est oublié. Le gouvernement veut encourager la R&D, promouvoir l’entrepreneuriat, développer les moyennes entreprises à fort potentiel, dynamiser le secteur manufacturier, accroître nos exportations, bâtir les infrastructures du Nord, investir 516 millions de dollars dans une stratégie d’électrification des transports et utiliser les gigantesques surplus d’électricité pour appâter des entreprises au Québec. Il y en a pour 152 pages. Voilà un beau supplément à l’Annuaire des subventions au Québec qui recense déjà 802 programmes d’aide aux entreprises dans ses 516 pages.
4. L’économiste Pierre Fortin m’a déjà dit que le Québec était «la république des crédits d’impôts à la R&D». Ces crédits nous coûtent une fortune et plusieurs s’interrogent sur leur efficacité. La solution du PQ: en accorder davantage et des plus gros. Le cadre financier total du plan présenté par Nicolas Marceau prévoit des dépenses supplémentaires de 1,29 milliard de dollars en crédits budgétaires et de 315,3 millions en mesures fiscales.
5. Pour le gouvernement, on crée des emplois en subventionnant des entreprises. C’est un principe de causalité: plus les crédits d’impôts et mesures fiscales augmentent, mieux se porte l’économie. En plus, cela semble automatique. Il suffit de créer une «Politique industrielle québécoise» et nous voilà avec 5 870 nouveaux emplois.
Je ne crois pas personnellement à cette savante mathématique des retombées économiques. Trop de facteurs sont à considérer pour qu’on puisse établir un tel lien. Combien vaudra le dollar canadien? Quelle sera la conjoncture économique mondiale? Quel sera le prix des matières premières? L’automatisation éliminera-t-elle d’autres catégories d’emplois en usine? Ferons-nous des gains en matière de productivité? Quel sera l’impact des imprimantes 3D? Les entreprises multinationales vont-elles choisir d’autres pays émergents avant de relocaliser leur production dans les pays développés? Le Québec est-il bien positionné alors qu’une bonne de partie de ses jeunes de 15 à 24 ans qui ne sont pas sur le marché du travail ou aux études sont sous-scolarisés dans un monde où l’éducation et la formation sont des facteurs décisifs?
Oui, des tarifs d’électricité plus bas «dans des secteurs stratégiques» peuvent inciter certaines entreprises à s’établir au Québec, mais j’admire le génie de ceux qui peuvent déjà évaluer que cela produira 1,3 milliard de dollars en valeur ajoutée en 2014-2015. On ne connaît même pas quel sera le rabais qui sera accordé à ces investisseurs qui ne sont pour le moment que potentiels!
Le gouvernement est le roi de la subvention, mais il est aussi l’expert des double-messages. Le climat d’incertitude qu’il a créé dans le secteur minier, au beau milieu d’une conjoncture mondiale misérable, a eu un impact négatif sur les décisions d’investissement et semé le doute chez les grandes minières. Le milieu des affaires montréalais craint que l’intention de forcer la francisation des PME (projet de loi 14) alourdisse un fardeau réglementaire déjà plus lourd qu’ailleurs. Les promoteurs du projet Rabaska, qui ont investi 60 millions dans cette affaire, n’ont pas plus aimé la façon cavalière dont ils ont appris la mort de leur bébé.
Le gouvernement gâte beaucoup les entreprises qui répondent à ses critères, mais aide-t-il à instaurer un environnement prévisible et hospitalier pour l’ensemble des milieux d’affaires? Permettez-moi d’en douter. Pourtant, Pauline Marois l’a répété lundi, la prospérité actuelle et future du Québec dépend d’abord des investissements privés.
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