Le premier ministre Harper n’a pas perdu de temps. Moins d’un mois après la démission de son ministre Peter Penashue, il annonce la tenue de l’élection partielle destinée à combler le siège vacant de Labrador. Le scrutin aura lieu le 13 mai et M. Penashue sera le candidat conservateur, peu importe ses accrocs à l’éthique électorale.
L’empressement de M. Harper était un secret de polichinelle, les conservateurs s’étant lancés en campagne dans les heures qui ont suivi la démission du ministre, le 14 mars dernier. Mais le fait qu’ils aient immédiatement choisi M. Penashue pour porter leurs couleurs, sans même attendre les conclusions d’Élections Canada dans son dossier, soulève des questions sur l’importance que le premier ministre accorde au respect de la Loi électorale.
M. Penashue a démissionné parce que sa campagne a accepté des contributions illégales lors de la dernière élection. Il s’agissait de dons d’entreprises présentés dans son rapport financier comme des dons individuels. Il a fallu qu’Élections Canada le somme de corriger le tout pour qu’il obtempère. En plus, il a dépensé au-delà de la limite permise.
Il a remboursé les sommes en question avec l’aide du parti, mais bien des gens estiment qu’il a triché pour gagner par tout juste 79 votes en 2011. De plus, Élections Canada n’a toujours pas clos son dossier. Il pourrait encore faire l’objet d’accusations.
Pour les conservateurs, la démission du ministre et le remboursement des dons litigieux suffisent. M. Harper a d’ailleurs dit aux Communes que les électeurs seraient juges. «Le ministre a démissionné et il est prêt à se présenter devant les électeurs et les électrices du Labrador. Dans notre système démocratique, ce sont les électeurs et les électrices qui décident d’une telle situation », a-t-il dit, comme si les électeurs pouvaient soustraire un député à l’application de la loi. Avec de tels propos, le premier ministre donne l’impression qu’il ne voit rien de mal à tricher en autant que les électeurs approuvent. Que l’État de droit est secondaire. Voilà qui est inquiétant.
C’est d’ailleurs mal reçu dans la circonscription. Un premier sondage montre que la candidate libérale, Yvonne Jones, l’ancienne chef du Parti libéral provincial, devance son adversaire conservateur par presque 40 points. Elle récolte 57 pour cent des appuis, suivi par le néo-démocrate Harry Borlase (21 %) et Peter Penashue (20 %). L’échantillon est petit et la marge d’erreur importante, mais l’écart entre les deux candidats est trop grand pour ne pas y lire un verdict clair.
Cette défaite quasi assurée explique peut-être l’impatience de M. Harper. Il veut que cela soit rapidement derrière lui. Mais il offre ainsi au nouveau chef libéral, qui sera élu dimanche prochain, l’occasion de donner une impression d’élan tôt dans son mandat.
Robocalls
Parlant d’élections, Élections Canada a porté les premières accusations dans l’affaire des appels automatisés frauduleux dans Guelph. Si l’agence est allé de l’avant, c’est parce que le commissaire aux élections fédérales croit avoir ce qu’il faut pour obtenir une condamnation.
J’ai toutefois le sentiment que ce n’est qu’un début car j’ai de la difficulté à croire qu’un seul travailleur d’élections, dans la jeune vingtaine, ait pu orchestrer les centaines d’appels trompeurs dont on s’est plaint dans cette circonscription. Et il y en a eu ailleurs.
Le jeune homme, Michael Sona, avait été rapidement servi en pâture par les conservateurs quand les allégations se sont faites insistantes dans Guelph. Il a toujours affirmé être un bouc émissaire et a clamé son innocence. Il promet de se défendre en cour.
S’il plaide non coupable, les conservateurs pourraient avoir quelques maux de tête. Un procès signifie des témoins, des interrogatoires et l’étalage public des façons de faire du parti. De plus, des gens qui n’ont pas voulu coopérer avec Élections Canada pourraient être sommés à comparaître.
Les conservateurs peuvent toujours répéter qu’on ne les a trouvés coupables de rien dans cette affaire, ce qui est vrai, mais le gros des soupçons pèse sur eux et Élections Canada n’a pas terminé son enquête. À suivre.
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